Alors que les tours du nouveau Pont international Gordie-Howe s’élèvent du sol, des murales qui évoquent l’histoire des terres sur lesquelles le pont est érigé, et qui racontent quelques histoires sur la culture et la diversité de la région, seront exposées.
Quatre artistes de la Première Nation de Walpole Island et de la Première Nation de Caldwell ont été sélectionnés pour créer des murales à exposer sur le site canadien du pont dans le cadre du plan d’avantages pour la communauté du projet, qui définit des possibilités pour les peuples autochtones du Canada.
Un artiste du sud-ouest de Détroit a également été engagé pour créer des œuvres d’art complémentaires qui honorent l’héritage mexicain du quartier sur le site américain du pont.
Chaque œuvre est présentée sur des panneaux qui sont fixés aux systèmes d’escalade de la grue à tour. Ces systèmes sont des structures temporaires en acier utilisées pour permettre l’accès aux travailleurs participant à la construction des deux tours massives qui soutiendront le pont.
Il y a quatre œuvres d’art du côté américain et six du côté canadien, de tailles différentes. La plus grande œuvre d’art mesure 15 mètres sur 12 mètres ou 49 pieds sur 39 pieds.
50 mètres ou 822 pieds, entraînant avec elles les œuvres, ce qui les rendra visibles depuis le sol des deux côtés de la frontière et depuis la rivière Détroit.
Inspirées des Premières Nations
Paul White, résident de Walpole Island, a été choisi comme coordinateur du projet pour le côté canadien et il a sollicité l’aide de Teresa Altiman, artiste bien connue de la Première Nation de Walpole Island, ainsi que de deux jeunes artistes, Daisy White de la Première Nation de Walpole Island et Naomi Peters de la Première Nation de Caldwell.
D’après M. White, lorsque le groupe a commencé à discuter de leurs créations en juin, ils ont développé une relation solide.
« Chaque artiste a participé à son propre travail et a créé des œuvres qui sont en relation les unes avec les autres. C’était une excellente collaboration, » affirme M. White.
En plus de peindre la feuille d’érable, un symbole emblématique du Canada, les quatre artistes ont également conçu des images d’ours, d’un aigle, d’un danseur de cerceaux et l’histoire de la création de l’île de la Tortue.
« On nous a demandé de créer une image d’ours pour représenter la détermination derrière le projet du pont, » explique M. White. « Nous avons collaboré les uns avec les autres et nous avons décidé de dessiner quatre ours dans nos couleurs sacrées, soit le blanc, le noir, le rouge et le jaune. »
Les ours sont très respectés pour leur force, leur courage et leur pouvoir spirituel dans les cultures autochtones.
Sous les ours se trouvent des images de pointes de flèches, qui ont également une signification importante pour les peuples des Premières Nations.
« Ces pointes de flèches représentent nos ancêtres qui ont voyagé et marché sur ces terres avant nous, » précise Mme Altiman. « Il est très important que les pointes de flèches soient là, car nous devons toujours rendre hommage à nos ancêtres. »
Mme Altiman est diplômée de l’Ontario College of Art and Design de Toronto et a reçu une bourse honorifique de l’école en 1986.
Son œuvre comprend l’image d’une tête d’aigle. Les peuples des Premières Nations du Canada croient que les aigles communiquent directement avec le Créateur, et les aigles, et plus particulièrement leurs plumes, sont très vénérés par les peuples autochtones du Canada.
« J’ai créé cette œuvre parce que l’équipe du pont voulait une illustration qui démontre l’intégrité, » raconte Mme Altiman, qui a également ajouté un bâton à exploits à son tableau, un symbole qu’elle qualifie de sacré pour les habitants de Walpole Island.
Mme Peters, 24 ans, dit qu’elle a travaillé sur 12 esquisses différentes impliquant des danseurs des Premières Nations avant de choisir un danseur de cerceaux qui représente sa culture Pottawatomi et Chippewa. L’image comprend quatre cerceaux aux couleurs sacrées, le jaune, le noir, le rouge et le blanc, ainsi que quatre remèdes traditionnels.
Mme Peters dit qu’elle a inclus la sauge, le foin d’odeur, le cèdre et le tabac, car ils jouent un rôle important dans la culture des Premières Nations et sont utilisés par différentes nations dans les cérémonies de prière, de peinture et de purification.
« J’aime la façon dont le dessin a été réalisé, car il semble vivant avec le mouvement du danseur, » poursuit Mme Peters. « Je souhaite sincèrement que les gens tombent sous le charme de la beauté de nos danses et de notre culture ».
Daisy White, qui, à 17 ans, est la plus jeune artiste du projet, a basé sa conception sur l’histoire de la création des peuples autochtones.
Elle présente un arbre sur la carapace d’une tortue, pour représenter l’île de la Tortue, ainsi que des rats musqués, qui dans l’histoire jouent le rôle du « plongeur terrestre », le seul animal à avoir réussi à plonger au fond de l’océan pour aller chercher de la terre pour que le Créateur puisse créer le monde.
« Les fruits et les fleurs de l’arbre symbolisent la vie et la force, » explique Mlle White, qui a également inclus des images de deux personnes vêtues de vêtements rouges en l’honneur des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées au Canada.
« Je suis très fière de mon œuvre, » proclame Mlle White. « J’ai hâte de voir la réaction des gens ».
L’Esprit de Détroit
Du côté américain, l’équipe du projet a engagé l’artiste local Roberto Villalobos, basé à Détroit, pour créer des œuvres reflétant l’histoire et la culture de la communauté hôte du sud-ouest de Détroit.
M. Villalobos, surnommé « BearLobos », a été élevé dans le sud-ouest de Détroit, à quelques minutes seulement du chantier de construction du Pont international Gordie-Howe. Il a commencé sa carrière artistique dans la rue. Il a ensuite étudié à la Wayne State University et au Columbia College de Chicago, un collège indépendant spécialisé dans les disciplines artistiques et médiatiques, où il a cultivé une expertise dans le domaine du design graphique.
« Je suis très heureux d’avoir été retenu, car le quartier me tient à cœur, » raconte M. Villalobos, qui a également recruté son fils Diego, surnommé « CubLobos », pour travailler sur deux représentations du drapeau américain ainsi qu’une image d’un aigle et de l’Esprit de Détroit.
M. Villalobos explique avoir utilisé une approche géométrique dans ses deux créations du drapeau américain afin d’apporter de la profondeur et du mouvement. Il a également ajouté des images de silhouettes de personnes sous la bannière étoilée.
« Elles représentent les ouvriers de la sidérurgie dans la région, » souligne M. Villalobos. « Il y a aussi une différence entre elles pour représenter l’égalité dans l’industrie ».
Comme pour les œuvres d’art du côté canadien du projet, il y a l’image d’un aigle et de son plumage. M. Villalobos a utilisé différentes couleurs dans cette œuvre d’art pour honorer la culture mexicaine et le patrimoine de la région.
M. Villalobos a réalisé sa représentation de l’Esprit de Détroit, la grande statue de bronze située dans le centre-ville de Détroit, de la même manière.
« J’ai adopté le même concept géométrique et je l’ai transposé à la statue, » explique M. Villalobos. « J’ai également intégré le coucher de soleil et le front de mer dans un motif de rayures qui est tiré de ma culture mexicaine, comme un clin d’œil aux gens qui vivaient dans le sud-ouest de Détroit ».
Un canevas métallique
Alors que M. Villalobos a utilisé une plateforme élévatrice à ciseaux pour tracer et peindre ses images directement sur les panneaux métalliques déjà placés sur le coffrage du site américain du pont, les artistes de Walpole Island et de Caldwell ont procédé différemment.
Les panneaux ont été placés individuellement sur le sol du centre culturel communautaire de Walpole Island pour être peints avant que les œuvres d’art achevées ne soient transportées à Windsor et sur le site canadien du pont. Les panneaux étaient si grands qu’ils occupaient la quasi-totalité de la largeur de l’aréna.
Paul White affirme que le personnel de Bridging North America, le partenaire du secteur privé de l’Autorité du pont Windsor-Détroit (APWD), a utilisé un logiciel pour redimensionner les créations des artistes afin qu’elles s’adaptent aux grands panneaux.
Le fait de travailler au centre communautaire a permis aux artistes d’impliquer davantage de membres de la communauté dans le projet. Plus d’une douzaine de bénévoles ont été recrutés pour aider à dessiner et à peindre les images.
« Nous avons fait venir de très jeunes enfants pour mettre un peu de peinture sur les panneaux, » explique M. White. « Beaucoup de gens pourront admirer ces œuvres et ils pourront dire qu’ils ont participé au projet et se l’approprier. »
« Cela dépasse de loin ce que nous avions envisagé au départ. C’est vraiment incroyable, » ajoute M. White.
Un patrimoine durable
Le Pont international Gordie-Howe reliera non seulement les économies du Canada et des États-Unis, mais aussi deux cultures riches et diverses.
Mme Altiman est fière que son travail et son patrimoine fassent partie d’un projet aussi emblématique.
« C’est une occasion formidable d’enseigner au public une petite partie de notre identité en tant que membres des Premières Nations, » poursuit Mme Altiman. « J’espère que les gens prendront le temps de se renseigner sur nos tableaux. C’est une occasion d’enseignement et d’apprentissage formidable ».
M. White ajoute que l’œuvre transmet un message fort.
« Nous pouvons voir les choses différemment et les interpréter un peu différemment, mais en fin de compte, nous croyons tous aux mêmes choses. Nous croyons aux valeurs de la famille et à la prise en charge des personnes, des animaux et de tous les êtres vivants sur terre. »
« J’espère qu’il sera bien reçu par toute la population, » ajoute M. Villalobos.
L’œuvre d’art restera sur les structures d’escalade pendant environ deux ans avant d’être réadaptée une fois le pont terminé.
Pour en savoir plus sur les artistes et leurs œuvres :
- 9 choses à savoir à propos des installations artistiques sur les chantiers
- Vidéo : Rencontrez les artistes
- Biographie des artistes
- Album de photos